Joe Carnahan est un cinéaste que l'on suit avec plaisir malgré un parcours en dent de scie, alternant le très bon et le très mauvais. Après un premier film écrit, réalisé et interprété par lui-même intitulé Blood, Guts, Bullets and Octane, du sang, des trippes, des balle et de l'octane, tout un programme, il déboule avec une bombe très sombre, Narc qui mettait en scène un Ray Liotta en état de grâce. Il enchaîne par un court, Ticker qu'il écrit d'après une idée de Joe Sweet et un concept de David Fincher, et un produit télé, Faceless, soit sans visage. Puis il signe la pire chose de sa carrière, Smokin' Aces, un film tellement foutraque et agressif qu'on l'oublie vite fait. On lui confie alors une grosse machine hollywoodienne, l'adaptation de la série télévisée L'Agence tous risques qui lui permettra en tout cas de rencontrer Liam Neeson, avec qui il se lance dans l'aventure de ce Territoire des loups.
Après une introduction qui nous expose la personnalité du personnage principal et la rudesse de ses compagnons, suivie d'une scène de crash aérien incroyable vécu de l'intérieur de la carlingue, le film ne suit plus qu'un mot d'ordre: survivre. Avec Le Territoire des loups, on s'immerge dans un cinéma d'action différent car, au lieu d'être simplement observateur d'un spectacle hors norme, on ressent ici physiquement l'œuvre. L'hiver et le froid deviennent aussitôt des personnages à part entière et le long métrage fonctionne astucieusement dans une logique triangulaire avec comme sommets respectifs, la nature, les hommes et les loups du titre français. Chapeautant les humains et les canidés, la nature, comportant la géographie du territoire et le climat qui y règne, s'amuse à monter régulièrement les uns contre les autres avec une préférence appuyée pour les loups.
Dans un scope particulièrement magnifié, Carnahan filme à hauteur d'homme mais sans ne jamais abuser des vues subjectives qu'il utilise parcimonieusement et toujours à propos, comme dans cette séquence haletante du ravin ou celle du torrent. Il opte pour un rythme parfaitement scandé dans lequel il se permet même de prendre son temps, à l'image de ce superbe travelling avant très lent sur le dos d'un personnage vers la fin de l'œuvre. La musique suit le même traitement, elle s'ancre au film de manière intelligemment dosée sans ne jamais chercher à en faire trop. Marc Streitenfeld confirme après Robin Hood qu'il faudra désormais compter sur lui. On se réjouit d'ors et déjà de découvrir sa partition pour Prometheus. On pourrait chipoter sur les loups qui peuvent paraître parfois surdimensionnés, mais, comme il sont traité à l'instar de démons n'ayant aussi qu'une seule préoccupation, survivre, à savoir tuer pour se nourrir, c'est un parti pris logique car ils sont vus par le regard des humains qui les diabolisent en danger absolu. Le travail des équipes chargées des effets spéciaux est d'ailleurs remarquable.
En ce qui concerne l'interprétation, il y a une chose qui frappe très rapidement, l'implication des comédiens dans leurs rôles. Pendant toute cette aventure on les sent investis de leurs personnages vivant à l'extrême les mêmes tourments qu'eux. Liam Neeson crève l'écran. Son personnage pourrait être le seul à se résigner et c'est pourtant celui qui mettra le plus de hargne et de conviction à vouloir s'en sortir vivant. C'est aussi grâce à lui que l'on a droit à des flashes back très émouvants en guise de respiration.
Il y a encore une derrière chose à savoir avant de s'installer pour ce voyage qui n'est pas de tout repos, la conclusion n'intervient qu'à la toute fin du générique.
https://www.youtube.com/watch?v=gqP2o62sZMs
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