par marrou Ven 27 Sep - 8:50
On aurait pu, sur ce thème grave, faire un film dramatique, polémique, satirique. Ici, on a quelque chose d’inclassable: tout cela ensemble, mené sur un rythme trépidant, mais juste. On se souvient de la définition de l’humour que donnait Jacques VACHé -l’ami d’André BRETON- suicidé pour s’amuser, en compagnie d’un ami* : « C’est le sens -j’allais dire la sensation -aussi- de l’inutilité théâtrale et sans joie de tout; quand on sait. ». Le film y fait penser. Inutilité théâtrale de tout, pas de problème. Sans joie? Oui et non. Est-ce drôle? Oui, très, très beaucoup (avec presque une utilisation systématique des principaux instruments pour produire le comique: de gestes, de mots, de situation, d’absurde, de farce, de malentendu, etc). En même temps, inséparablement, aucune joie : même si les terroristes veulent sourire en se faisant exploser, rien de drôle dans le fait de tuer, par là, pas mal de gens qui auraient mieux fait d’être ailleurs (fin du film).
Le mixte (sérieux et comique) est parfaitement réussi et obtient l’effet recherché -j’imagine- : évacuer par le rire une des angoisses de notre époque: les actes meurtriers imprévisibles. Ridiculiser quelque chose est sans doute la meilleure façon de faire réfléchir un peu ceux qui le peuvent encore**, beaucoup d‘entre nous étant inaccessibles au raisonnement, enfermés qu‘ils sont dans la litanie, la rumination, le rabâchage de ce qui les a séduits, qu‘ils prennent pour de la pensée. Mais l’auteur du film parvient à éviter un piège: une satire dévastatrice risquerait vite de faire long feu, malgré l’efficacité du ridicule. Or les cinq terroristes sont … sympathiques, très sympathiques. On a ici une subversion du personnage du héros : sortes de héros, ces cinq personnages ridicules, ont un statut très particulier dans la tête du spectateur: ni adhésion, ni identification possibles. On ressort du film sans rien de ce qui fait en général la relation aux personnages principaux d’une histoire, mais plutôt avec un soulagement par le rire mais aussi plein de points d’interrogation : cette absurde expédition, à quoi rime-t-elle - et donc ce genre de choses de façon générale-?; autre question : cette belle jeune femme du chef du groupe, qui lui dit qu’il était plus drôle quand il voulait se faire exploser, leur enfant bercé par des contes qu’il ramène déjà à des garanties d’aller plus vite au paradis et à son statut de soldat, que signifient-ils? Aucun sens, comme le monde que nous connaissons? Comédie humaine, encore?
*l’auteur de « Nadja », dans son « Anthologie de l’Humour Noir », classique, fait de cette définition presque le centre de son recueil d’extraits d’humoristes selon lui
** je ne sais pas si le ridicule a déjà été tenté pour faire réfléchir les gens qui se droguent. Dramatiser dans des spots ou des films les campe dans la position de héros qui bravent la mort et les valorise donc.
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