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    "Irina Palm", de Sam GABARSKI (2007)

    marrou
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    "Irina Palm", de Sam GABARSKI (2007) Empty "Irina Palm", de Sam GABARSKI (2007)

    Message par marrou Mer 21 Aoû - 9:06

    Le « Go Go Tales » de FERRARA jouait avec la dimension du conte, puisque quoique se passant dans une boîte de nuit plutôt minable avec des danseuses qui s’exhibent pour le plaisir des voyeurs, le patron* gagne au loto. « Irina Palm » alterne, allant de l’hôpital à la boîte de nuit, au sex shop plus exactement, boutique du sexe dans laquelle la grand-mère, décidée à tout pour sauver son petit-fils très gravement malade, accepte de masturber les clients et se révèle experte. Et l'ensemble tournera au conte, à la fin.

    On a souvent dit que le romantisme se caractérisait, entre autres critères, par la mise en coexistence du très haut et du très bas, du haut et du bas tout au moins. A ce titre, « Irina Palm » est un film romantique en même temps qu’un conte (Irina, nom de travail de la grand-mère, réussit à gagner l’argent nécessaire aux soins du petit-fils, « palm » étant son outil). Un film qui vous prend de partout, d’abord parce qu’il fait passer le cinéma derrière l’histoire : aucun souci de démontrer quoi que ce soit par le cinéma. L’histoire emporte tout : le récit parvient à configurer et mêler harmonieusement 1) le thriller (Irina va-t-elle pouvoir remplir son contrat ?, va-t-elle céder aux propositions d’un autre directeur de sex shop mieux offrant ?) ; 2) la critique sociale de la curiosité et de l’hypocrisie pudibondes ; 3) le drame familial (le fils est d’abord révolté que sa mère ait fait cela, eût-ce été pour son fils à lui ; c’est sa jeune femme qui mesure l’amour derrière le sacrifice de sa belle-mère et qui le fait changer d’attitude) ; 4) l’amour entre le patron du sex shop et Irina (cette autre dimension de conte parvient à convaincre, malgré tout, puisque le film finit de façon ouverte, dans la mesure où on ne sait pas si Irina, revenant avec sa valise, va continuer son activité experte ou être une compagne : clin d’œil, donc, un autre étant le diagnostic  du médecin et de la collègue d’Irina, qui reconnaissent immédiatement, aux courbatures d’Irina, un penis elbow !). Pas d’épate, pas d’esbroufe. Une histoire comme celle-là se suffit à elle-même, si on est à la hauteur comme cinéaste, et GABARSKI semble bien être celui qu’il fallait.

    Et puis, cette petite bonne femme aux mains magiques, avec ou à partir de ce choix saugrenu (mais elle ne sait rien faire d’autre !!!, et elle doit trouver de l’argent), fait faire un « renversement des valeurs », comme disait un philosophe, au spectateur qui en serait resté, dans un coin de sa tête, au siècle dernier ou celui d’avant, pendant lesquels certains croyaient encore que la pratique solitaire condamnait au châtiment divin ou moral au moins**. Les gens, nombreux aujourd’hui, qui ont fait, grâce à leur urologue ou tout seuls dans leur coin ou parce qu’on n’en est plus là, ce renversement, ne peuvent que se réjouir de voir  un tel film, magnifique et  à la fois pas du tout moralisateur en même temps que très moral et réjouissant.


    *magnifique interprétation de  William DAFOE
    **ah, si on avait laissé les gens suivre leur inspiration, on n’en serait peut-être pas à 6 ou 7 milliards maintenant !

      La date/heure actuelle est Jeu 16 Mai - 18:42